dimanche 10 mai 2020

FEUILLETON 28 LA VIE EN ROSE

Résumé des épisodes précédents : l'enquête sur la disparition de la partition rose a été rondement menée par Pauline et le Chef. Léonide et Melchior ont été démasqués. La CGF a pu répéter. 


09/05/2020

Épisode 28

A 16 heures, la répétition de la Partition Rose était terminée. Les nuances, les harmonies, les mélodies, l’esprit si subtil de l’œuvre, la force du second mouvement, la grâce du dixième et la subtilité miraculeuse du quarante septième furent parfaitement maîtrisés. Commençaient alors les préparatifs du dernier concert, le compte à rebours était en route.

L’autobus s’arrêta sur le parvis de la Basilique Sainte-Rosalie de Rosolarios. Perchée au-dessus d’une grande place urbaine, il ne fallait pas moins de deux cent trente marches pour y accéder. A quatre temps, cela fit un très bel exercice de respiration.


L’église était immense, bâtie avec un granite tout rose. Sous un dais immense, soutenu par des colonnes de bois tourné, se trouvaient les gradins et le piano, le même que celui dont s’était servi Elton John pour son concert de la semaine dernière, tout laqué de rose. Aïda, qui connaissait ce piano pour l’avoir déjà joué à New-York, avait revêtu une magnifique robe assortie.



Pendant cette installation, le Chef était encore avec Léonide et Melchior qui refusaient de venir chanter. L’embarras du Chef était bien réel. 

- J’ai besoin de vous, dit-il, surtout toi, Léonide, qui chante tout le solo du vingt-quatrième mouvement.

La discussion fut assez longue et Firminie, venue chercher le chef car le temps pressait, ne sut pas ce qu’ils s’étaient dit. Elle crut entendre, lorsque le Chef se mit à la suivre : « On fait comme on a dit »… C’est tout ce qu’elle put rapporter à ses amis… 

Le Chef dirigea un petit raccord qui se passa fort bien, les alti et les soprani peaufinèrent leur maquillage et les basses ajustèrent les papillons, parfaitement horizontaux et centrés.

Les petits bavardages continuaient, ils étaient encore permis avant l’entrée en scène, et, bien-sûr, le cas de Léonide et de Melchior était sur toutes les lèvres. On sentait même quelques petits mécontentements gronder. Mais, comme l’affirma la Présidente à la sagesse impériale, il faut faire, comme d’habitude, confiance au chef, ce qui rassura tout le monde.


A 20 h 30 précises, la Chorale des Gazouillis Farfelus entra en scène, impressionnée par tant de monde, tant d’applaudissements et cette architecture si vaste de la Basilique Sainte-Rosalie de Rosolarios. Le silence s’installa, assez long pour créer une petite panique, surtout que ni Aïda ni le Chef n’étaient en scène. Et, soudainement, résonna avec un plein jeu d’une beauté tonitruante, l’orgue immense, au moins 12 547 tuyaux est-il écrit sur le guide touristique. Un prélude magnifique résonnait avec splendeur et, au moment où commença la fugue, on vit arriver, dans la grande allée centrale, Aïda, avec… Melchior au bras… Quel étonnement !?!?!

Bach, Prélude et fugue en la mineur
David Cassan

Arrivé à la hauteur du chœur, pas celui qui chante, celui qui porte l’autel, un suisse, venu spécialement du Vatican, apporta un fauteuil  et  frappa le sol de sa hallebarde.


Et, au moment où l’orgue amena dans la complexité de sa fugue un second sujet qui alla se mêler au premier, ornementé d’un second contre-sujet, arriva, toujours dans la grande allée centrale, le Chef avec… Léonide à son bras, en robe de mariée. Il la mena jusqu’au second fauteuil apporté par un second suisse. Léonide sourit à Melchior 😁 💖 et le cardinal arriva.

Ce fut un mariage somptueux. Aïda fut le témoin de Melchior et le Chef celui de Léonide. On chanta l’Ave Verum, le Cantique de Jean Racine, le Magnificat, le Rigolosa et tous les cantiques qui ornèrent avec splendeur ce moment de magie mariale. Léonide dit oui à Melchior et Melchior dit oui à Léonide . Et l’Alleluïa de Haendel résonna avec éclat.
Haendel, Le Messie, Alleluia
F.X. Roth

Enfin, juste après que le cardinal eut prononcé le Ite missa est, le premier accord de la partition rose crépita de bonheur, pendant que Léonide et Melchior rejoignirent main dans la main les rangs du chœur. Ce fut un concert fabuleux, époustouflant. Cette création de la Partition Rose, qui parlait de bonheur et d’amour, qui semblait faite à la mesure exacte de Léonide et Melchior, fut en éblouissement d’un bout jusqu’à l’autre.

Le public exigea tant de bis que le concert dura le double du temps prévu. Heureusement, le traiteur de la réception officielle avait tout prévu. Il savait, tant la renommée de la CGF est grande, que cela se passerait ainsi. Surtout que les discours furent un peu longs car le maire offrit à Léonide et Melchior les clefs de la Ville, à Aïda un autographe d’Elton John, à la Présidente à l’âme augeronne le diplôme des Chœurs Bien Menés et au Chef l’insigne de l’ordre des plus grands Chefs du Monde.




Dés que l’autobus fut complet, il partit vers le nord et un nouveau cocktail fut servi, joyeux. La suite royale fut réservée à Léonide et Melchior, avec le lit à baldaquin, et tous rejoignirent leurs draps qui, pour cette dernière nuit étaient d’un rose limpide et flamboyant.


L’autobus roulait sous la lune et les étoiles qui parfois filaient, sous le bleu nuit d’un ciel de joie, et rentrait à l’allure autorisée moins dix pour cent par sécurité vers le Conservatoire à Rayonnement Hygiénique qui devait bien s’ennuyer…


E.P.

A suivre…


Édith Piaf
La Vie en rose


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