Blog d'une choriste amateur qui a découvert le chant sur le tard et qui a beaucoup de plaisir à chanter dans sa chorale de Lisieux (Calvados) : L'Ensemble Vocal Gabriel Fauré, au répertoire varié mais centré sur la musique sacrée.
Tout sur les programmes du choeur, les répétitions, les concerts... Sur ses collaborations avec des associations, des chorales amies, des orchestres, des organistes.
Vive la musique et le chant choral !
Giulio CACCINI, né à Tivoli en 1551 et mort à Florence en 1618, a mené l'essentiel de sa carrière à Florence au service de la famille des Médicis comme compositeur, chanteur et instrumentiste ( il jouait, entre autres, du luth, de la viole, de la harpe...)
Il a écrit de nombreuses pièces vocales, d'abord polyphoniques puis surtout monodiques, dans le style de la fin de la Renaissance et du début du Baroque.
La postérité ne l'a pas oublié, sans qu'il soit vraiment célèbre auprès du grand public... à part pour son AVE MARIA.
Caccini
" Son" Ave Maria ?
En 1970, Vladimir VAVILOV (1923-1973), compositeur, guitariste et luthiste russe, enregistre un disque intitulé Musique de luth des XVI° et XVII° siècles dans lequel figure un " AveMariad'unauteurinconnuduXVI° siècle ".
Vavilov
Jusque là tout va bien !
En 1975, Irina Bogacheva enregistre à son tour cet AveMaria... qui est attribué à Caccini et devient donc " L'Ave Maria de Caccini ".
Et le mystère commence !
Car le style de ce morceau n'a rien à voir avec celui de Caccini, ni d'ailleurs avec celui de la fin du XVI° siècle. Il évoque plutôt la fin du XVIII° et le début du XIX°, avec des accents pré-romantiques.
Alors ?
Caccini l'aurait-il écrit à la fin de sa vie, dans un style nouveau ( et même très, très nouveau ) ?
Serait-ce l'oeuvre d'un de ses élèves ?
On a même avancé l'hypothèse qu'une femme pourrait en être l'auteure, mais en coulisses, comme certaines épouses discrètes mais talentueuses de musiciens célèbres...
Le plus probable est que ce soit Vavilov lui-même qui ait composé cet AveMaria. Mais pourquoi ne pas se l'être attribué ?
Ou alors c'est vraiment l'oeuvre d'un inconnu !
Toujours est-il que Caccini est célèbre grâce à une oeuvre qu'il n'a pas composée ( et dont il a tout ignoré ). Quant à Vavilov, il est mort pauvre, sans savoir que cet Ave Maria aurait pu faire sa fortune.
Il existe de très nombreuses versions et interprétations de l'AveMaria de Caccini : solo, duo, choeur... Ici un contre ténor, André Vasary.
Avant le confinement ( et plus précisément le 7 mars, une époque qui paraît bien lointaine... ), j'avais écrit un petit article sur Apollinaire : une brève biographie et quelques mots sur les poèmes L'Adieu et LaFéeMélusine ( dont le titre est en réalité Poème à Yvonne ), dont nous commencions à déchiffrer les adaptations musicales.
Avec le déconfinement et la reprise des répétitions, les "Dames" ( quelques-unes du moins ) ont retrouvé Apollinaire et deux nouveaux poèmes :
AuLacdetesyeux
et Jerêve
Ces deux poèmes sont plus tardifs que les deux autres et ont été créés dans des circonstances bien différentes. En effet, " la Fée Mélusine " datait de 1903, " L'Adieu " de 1905 et les deux étaient parus dans le recueil Alcools en 1913 .
Les deux autres poèmes ont été écrits pendant la guerre et envoyés à Lou, de son vrai nom LouisedeColigny-Châtillon, rencontrée à Nice en septembre 1914 et pour laquelle Apollinaire a eu un coup de foudre ( une de ses spécialités ! )
Ils rompent en mars 1915, juste avant le départ d'Apollinaire au front de Champagne en avril. Il faut dire que Lou n'a jamais vraiment quitté son ancien amant et Apollinaire vient de rencontrer Madeleine Pagès, avec laquelle il se fiance ( mais qu'il n'épousera pas ! ) Une riche correspondance commencée en septembre 1914 se poursuivra néanmoins jusqu'en janvier 1916, peu de temps avant la blessure d'Apollinaire le 17 mars et sa trépanation. Apollinaire envoie de très nombreuses lettres à Lou et au dos de plusieurs d'entre elles il compose des poèmes. Ces 76 poèmes seront réunis et publiés en 1947 sous le titre Ombredemonamour qui deviendra PoèmesàLou en 1955. Au moment de la parution, Apollinaire est mort depuis longtemps, en 1918, de la grippe espagnole ( eh oui...) à 38 ans. La correspondance elle-même sera à son tour publiée en 1969. Les thèmes de l'amour ( passion, érotisme, regret, mélancolie...) et de la guerre s'entremêlent constamment dans les poèmes comme dans les lettres.
" Au Lac de tes yeux " a été écrit à Nîmes le 18 décembre 1914, et " Je rêve " dont le titre, plus prosaïque, est en réalité " En allant chercher des obus " a été écrit à Courlemois ( en Champagne ) le 13 mai 1915.
À gauche : Apollinaire, artilleur, par l'ami Picasso.
Apollinaire a fréquenté de nombreux artistes, beaucoup de peintres, mais aussi des musiciens... Ses poèmes, aux sonorités particulièrement musicales, en ont inspiré plus d'un, et non des moindres, comme Francis Poulenc, Arthur Honegger, Germaine Tailleferre, Chostakovitch... Plus récemment Léo Ferré... et... devinez... Emmanuel Pleintel, notre talentueux et vénéré chef, qui est l'auteur des Trois chansons minuscules et simplettes sur des poèmes de Guillaume Apollinaire . Les trois chansons sont d'ailleurs devenues quatre en cours de route !
Je n'ai malheureusement pas d'enregistrement à proposer pour le moment ! 😉
En revanche voici le texte complet de " Je rêve " ( dont nous chantons la troisième strophe de seulement 2 vers = un distique ).
Si vous avez la patience de lire, vous verrez que l'ensemble du poème est loin de se limiter au rêve et à " l'âme ", comme la strophe que nous chantons pourrait le laisser supposer ! 😀
Toi qui précèdes le long convoi qui marche au pas
Dans la nuit claire…
Les testicules pleins, le cerveau tout empli d’images neuves…
Le sergent des riz pain de sel qui jette l’épervier dans le canal bordé de
tilleuls…
L’âme exquise de la plus Jolie me parvient dans l’odeur soudaine des
lilas qui déjà tendent à défleurir dans les jardins abandonnés
Des Bobosses poudreux reviennent des tranchées blanches comme
les bras de l’Amour
Je rêve de t’avoir nuit et jour dans mes bras
Je respire ton âme à l’odeur des lilas
Ô Portes de ton corps
Elles sont neuf et je les ai toutes ouvertes
O Portes de ton corps
Elles sont neuf et pour moi se sont toutes refermées
À la première porte
La Raison Claire est morte
C`était, t’en souviens-tu le premier jour à Nice
Ton oeil de gauche ainsi qu`une couleuvre glisse
Jusqu’à mon coeur
Et que se rouvre encore la porte de ton regard de gauche
À la seconde porte
Toute ma force est morte
C`était t’en souviens-tu dans une auberge à Cagnes
Ton oeil de droite palpitait comme mon coeur
Tes paupières battent comme dans la brise battent les fleurs
Et que se rouvre encore la porte de ton regard de droite
À la troisième porte
Entends battre l’aorte
Et toutes mes artères gonflées par ton seul amour
Et que se rouvre encore la porte de ton oreille de gauche
À la quatrième porte
Tous les printemps m’escortent
Et l’oreille tendue entends du bois joli
Monter cette chanson de l`amour et des nids
Si triste pour les soldats qui sont en guerre
Et que se rouvre encore la porte de ton oreille de droite
À la cinquième porte
C`est ma vie que je t’apporte
C’était t’en souviens-tu dans le train qui revenait de Grasse
Et dans l`ombre, tout près, tout bas
Ta bouche me disait
Des mots de damnation si pervers et si tendres
Que je me demande, ô mon âme blessée
Comment alors j’ai pu sans mourir les entendre
Ô mots si doux, si forts que quand j’y pense il me semble que je les touche
Et que s’ouvre encore la porte de ta bouche
À la sixième porte
Ta gestation de putréfaction, ô Guerre, avorte
Voici tous les printemps avec leurs fleurs
Voici les cathédrales avec leur encens
Voici tes aisselles avec leur divine odeur
Et tes lettres parfumées que je sens
Pendant des heures
Et que se rouvre encore la porte de ta narine de gauche
À la septième porte
Ô parfums du passé que le courant d’air emporte
Les effluves salins donnaient à tes lèvres le goût de la mer
Odeur marine, odeur d’amour; sous nos fenêtres mourait la mer
Et l’odeur des orangers t’enveloppait d’amour
Tandis que dans mes bras tu te pelotonnais
Quiète et coite
Et que se rouvre encore la porte de ta narine de droite
À la huitième porte
Deux anges joufflus veillent sur les roses tremblantes qui supportent
Le ciel exquis de ta taille élastique
Et me voici armé d`un fouet fait de rayons de lune
Les amours couronnés de jacinthe arrivent en troupe
Et que se rouvre encore la porte de ta croupe
À la neuvième porte
Il faut que l`amour même en sorte
Vie de ma vie
Je me joins a toi pour l’éternité
Et par l’amour parfait et sans colère
Nous arriverons dans la passion pure ou perverse
Selon ce qu’on voudra
À tout savoir à tout voir, à tout entendre
Je me suis renoncé dans le secret profond de ton amour
Ô porte ombreuse, ô porte de corail vivant
Entre les deux colonnes de perfection
Et que se rouvre encore la porte que tes mains savent si bien ouvrir
Après trois mois d'interruption, d'innombrables mails, un feuilleton palpitant, un changement de nom et un mariage, après des interrogations, de nombreuses discussions, des avancées, des retours en arrière, des espoirs, des déceptions, un sondage...
l'EVGF a finalement repris ses répétitions,
non plus virtuelles mais bien réelles !
Avec quelques aménagements toutefois : sur la base du volontariat, en trois groupes successifs de moins de 10 personnes pour le moment ( 1 groupe d'hommes, 2 groupes de femmes ), à l'église d'Ouilly-le-Vicomte. Des " petits choeurs " donc, avec programme différent pour les hommes et pour les femmes, à l'exception d'une oeuvre commune : le désormais célébrissime " Canon ducarton ".
Une constante bien sûr : notre chef ❤, fidèle au poste, fier capitaine bravant le/la Covid et son cortège de postillons !
Les retrouvailles ont donc été partielles, mais joyeuses quoique distanciées. Et, cela va sans dire, STUDIEUSES !